03. Pour des milieux de travail sains, sécuritaires et exempts de harcèlement

Le milieu des arts et de la culture n’est malheureusement pas exempt de comportements nocifs menant à des situations de harcèlement psychologique, voire sexuel. Comme dans tout milieu de travail, les relations de pouvoir y sont bien réelles.

Depuis 2004, le Québec s’est pourtant doté de dispositions pour prévenir et bannir le harcèlement psychologique en milieu de travail. Ainsi, les normes du travail établissent que c’est l’employeur qui a l’obligation de fournir un milieu de travail exempt de harcèlement psychologique. Les milieux syndiqués peuvent par la suite négocier des moyens concrets pour y parvenir : une politique interne sur le harcèlement psychologique, une procédure confidentielle de dépôt de plaintes, etc.

La Loi sur les normes du travail (LNT) prévoit également que quiconque portant plainte pour harcèlement psychologique ne peut subir de représailles de la part de son employeur. En fonction des réalités contractuelles particulières du secteur artistique, il est illusoire de croire qu’une ou un artiste victime de harcèlement déposera une plainte sans hésiter. Le déferlement d’histoires sordides, dont plusieurs remontent à des années, depuis le début des vagues de dénonciation tend plutôt à prouver le contraire. La crainte, fondée, de subir des représailles a contribué à prolonger ce contexte de travail des plus malsains.

Les dispositions de la LNT en matière de harcèlement ne s’appliquent pas d’emblée au milieu culturel. Les associations d’artistes se retrouvent dans la position où elles doivent se battre pour négocier les mêmes principes que ceux prévus par la loi et les inclure dans leurs ententes collectives. Au mieux obtiendront-elles le même texte, au pire elles en obtiendront une version édulcorée. Dans les milieux de l’édition (où non seulement la LNT ne s’applique pas, mais où aucune entente collective n’est possible), aucune balise ne vient régir les situations de harcèlement.

La solution :

  • Modifier la Loi sur le statut de l’artiste afin de prévoir explicitement que les articles 81.18 à 81.20 des normes du travail s’appliquent à l’ensemble de nos milieux de travail et de création ;
  • Que les associations d’artistes puissent négocier, à partir de ces normes minimales, d’autres protections et mesures de prévention contre le harcèlement psychologique et sexuel au travail.

Avoir des droits en santé et sécurité au travail

Un principe simple doit soutenir toute approche en matière de santé et de sécurité au travail : d’abord prévenir les accidents et les lésions, puis en réduire les impacts et indemniser les personnes qui en sont victimes. Les deux lois de santé et sécurité au travail sont basées sur ce principe : les mécanismes de prévention sont prévus à la Loi sur la santé et la sécurité du travail (LSST), ceux voués à la réparation et l’indemnisation étant établis par la Loi sur les accidents de travail et les maladies professionnelles (LATMP).

Ces lois prévoient qu’il est de la responsabilité de l’employeur de fournir un environnement et des pratiques de travail sécuritaires. Elles s’appliquent à tous les milieux de travail, que ceux-ci soient syndiqués ou non.

Par contre, il n’existe aucun mécanisme formel prévoyant que ces lois s’appliquent aux artistes, même si ceux-ci peuvent, en certaines circonstances, bénéficier des dispositions de la loi. Certaines catégories d’artistes en sont complètement exclues, comme c’est le cas des concepteurs de théâtre et des professionnel-les des arts de la scène qui travaillent pourtant… dans le même environnement que d’autres artistes.

Ainsi, au même moment, dans un seul et même milieu de travail, certains pourraient être indemnisés en cas d’accident, d’autres pas. Difficile de faire pire en matière de disparité de traitement. Ces artistes doivent alors contracter une assurance individuelle auprès de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST), ce qui amplifie le fardeau financier imposé à ces artistes.

Il est également choquant de constater que l’indemnité de revenu lors du retrait préventif de la travailleuse enceinte peut être interrompue lors de tournées à l’étranger ou encore que les artistes peuvent être privés de la possibilité d’invoquer un droit de refus en situation de danger immédiat.

De plus, de nombreux litiges ne se produisent qu’en raison du flou juridique entourant l’application de la LSST et la LATMP au sein des différents milieux de travail où nous évoluons. Il est déplorable que le statut contractuel d’un artiste ou encore le nombre d’heures effectuées dictent si celui-ci a pleinement droit à un environnement de travail sécuritaire.

Cet état de fait est particulièrement aberrant quand on connait la nature singulière du travail des artistes, qui les amène régulièrement à se présenter sur des lieux de travail qui comportent souvent des risques d’accident – sans même avoir à penser aux échafaudages et autres effets pyrotechniques.

La solution :

  • Modifier la LATMP et la LSST afin de clarifier que les artistes visés par la Loi sur le statut de l’artiste constituent des travailleurs au sens de ces lois.

La réforme de la Loi sur le statut de l’artiste en cinq points

01. Avoir droit à des conditions minimales pour tous nos secteurs

La réforme de la Loi sur le statut de l’artiste doit en priorité colmater les brèches qui permettent à certains producteurs de ne pas respecter les ententes qui régissent le milieu :

  • Des producteurs qui refusent de renouveler les ententes collectives en étirant les négociations, parfois pendant plus de 20 ans.
  • Des plateaux de production où l’on travaille au rabais sans les conditions minimales et salariales établies par les ententes collectives.
  • Des secteurs entiers où aucune entente collective n’est appliquée et où les conditions minimales de travail ne sont que partiellement respectées.

La réforme attendue doit également rapatrier le secteur de la littérature afin que les auteurs et autrices puissent négocier des ententes collectives avec les diffuseurs et les producteurs.

02. Élargir le champ d’application de la loi

Contrairement aux autres artistes, les écrivaines et les écrivains sont actuellement exclus du droit à des ententes collectives pour le milieu de l’édition. Dans l’industrie musicale et celle de la danse, une faible proportion des productions est régie par des ententes qui instaurent des conditions minimales. 

Tout se passe dans des négociations de contrats de gré à gré, le rapport de force s’avère pratiquement inexistant et les conditions sont souvent imposées. Voilà pourquoi le champ d’application de Loi sur le statut de l’artiste doit être élargi.

03. Pour des milieux de travail sains, sécuritaires et exempts de harcèlement

Pourtant accessibles à tous, les dispositions de la Loi sur les normes du travail en matière de harcèlement ne s’appliquent pas d’emblée à l’industrie culturelle. Les associations d’artistes doivent en négocier les principes entente par entente. Pourquoi les artistes et les travailleurs du milieu culturel n’ont-ils pas droit, ipso facto, aux mêmes protections que le reste de la population ?

Au Québec, il est de la responsabilité de l’employeur de fournir un environnement et des pratiques de travail sécuritaires. Ces dispositions s’appliquent à tous les milieux de travail, que ceux-ci soient syndiqués ou non. Il n’existe aucun mécanisme formel prévoyant que ces lois s’appliquent aux artistes, même si ceux-ci peuvent, en certaines circonstances, bénéficier des dispositions de la loi. Certaines catégories d’artistes en sont complètement exclues, comme c’est le cas des concepteurs et professionnels des arts de la scène, qui travaillent pourtant… sur les mêmes plateaux de production.

04. Pour que l’argent public ne ferme plus les yeux

Les programmes de subventions du gouvernement et de ses organismes publics ne sont soumis à aucune obligation de s’assurer de l’application d’une entente collective lors de la production de l’œuvre. Les producteurs, bénéficiaires de ces fonds, n’ont pas de comptes à rendre à cet égard et certains agissent impunément. 

La portion de l’argent public qui se rend aux créateurs n’est certainement pas à l’échelle perçue par le grand public ni à ce qu’on pourrait appeler une juste répartition. Il faut au minimum modifier les programmes de soutien de l’État aux producteurs de manière à rendre conditionnel l’accès au financement public à l’application par ces producteurs de conditions de travail minimales pour les artistes.

05. Faire respecter nos droits

À l’instar de l’ensemble des travailleuses et des travailleurs québécois, les artistes doivent avoir accès à un tribunal spécialisé pour protéger leur liberté d’association, leur droit à la négociation collective et les protections qui en découlent. 

Au Québec, c’est le rôle du Tribunal administratif du travail (TAT) : une procédure juridique simplifiée, des magistrats spécialisés en relations de travail et des coûts raisonnables. Comme tout le monde, les artistes doivent pouvoir y avoir accès.

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